Hier, c’était la fête de saint Antoine de Padoue. Dans le temps, c’était un saint très vénéré en Occident. À vrai dire, chaque saint a eu son heure de gloire, pour ainsi dire. Il y a eu d’abord les saints auxiliaires, puis saint Joseph et saint Antoine de Padoue avec sainte Rita. De nos jours, sainte Thérèse de Lisieux et d’autres comme elle ont plus de popularité.
Le problème vient, me semble-t-il, du fait que les gens pieux ont moins envie d’imiter les saints dans leurs vertus et leur enseignement. Revenons, donc, à saint Antoine de Padoue. Sur YouTube vous trouvez un documentaire sur sa vie.
Beaucoup moins populaire a été saint Basile le Grand, que nous fêtons aujourd’hui. Au fait, si la date de la fête byzantine de saint Basile est le 1er janvier, cela présuppose une concurrence avec la fête de la circoncision du Seigneur; c’est pourquoi, l’Occident fête traditionnellement le 14 juin, jour de sa consécration épiscopale.
L’Occident tardif a vu dans saint Basile seulement le fondateur monastique oriental. À vrai dire, saint Basile a écrit une règle monastique, encore en vigueur chez certains moines et moniales de rite byzantin. Ainsi est-il en quelque sorte l’homologue grec de saint Benoît. (Dans sa règle, saint Benoît parle de saint Basile.) Et, comme l’Orient a toujours refusé de séparer la vie contemplative d’avec la vie active, saint Basile a également été le fondateur du tout premier hôpital, dans le sens moderne du terme.
Mais ce n’est pas pour son côté monastique que saint Basile est digne de louange. Au contraire, il est réputé pour ses écris théologiques, dont Contre Eunome et le Traité sur l’Esprit Saint, et la victoire de l’orthodoxie sur l’arianisme et le pneumatomachisme. (Plus de détails ici.)
Mais un autre thème, concernant Basile, et qui est tout à fait actuel, c’est la question liturgique de l’anaphore selon Basile.
Il y a plus de quinze ans, j’ai entendu une théorie de la bouche de certains patrolatres (*), prétendant que l’Église primitive eût connu seulement une ordo de la messe composé par saint Jacques de Jérusalem, et que saint Basile et saint Jean Chrysostome eussent abrégé cet ordo-là. Bien entendu, ces affirmations-là n’ont aucun fondement.
En réalité, l’anaphore selon saint Basile est l’aboutissement du développement organique d’une anaphore cappadocienne. C’est une longue anaphore, mais pas la plus longue que la Tradition nous ait conservée. Elle est complètement parsemée de citations bibliques, et a un beau bagage christologique. Et puis, théologiquement parlant, elle remplit parfaitement son rôle d’action de grâce.
Pourquoi, donc, l’Occident l’évite? Parce que l’Occident a été habitué à parler de « prière de consécration », comme si le but d’une telle prière était la consécration des éléments eucharistique. Du coup, suivant cette mentalité, il suffirait de dire quelques paroles magiques en vue de la consécration, et basta! Mais la Tradition nous dit autre chose. L’Église récite une telle prière dans le but de rendre grâce à Dieu. La consécration du pain et du vin est seulement une rawette! C’est comme lorsqu’on va souper chez des amis. Le but n’est pas de manger. On y mange, mais ça, c’est la rawette, même si le fait de manger est très important pour la santé. De même, la sainte communion est très importante; cependant le but de l’anaphore est de rendre grâce à Dieu. C’est le sens même du mot « eucharistie »: action de grâces.
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(*) En Occident, il y a des papolatres. En Orient il y a des patrolatres. Ces derniers prennent les pères de l’Église comme autorités incontestables, qui auraient des pouvoirs de décision émanant directement du Christ, et qui se substitueraient à la Tradition.