Adeste fideles en français.

Au fur des années, j’ai trouvé des traductions-adaptations du noël Adeste fideles vers le français, mais aucune ne me semblait satisfaisante. J’ai eu en 2013 un échange là-dessus avec le père Georges Pfalzgraf, et il n’avait pas l’air trop satisfait non plus.

Pour finir, je me suis enfin attelé à la tâche, et voici le résultat.

Vu qu’il y a cinq vers par couplet, j’ai fait rimer les vers deux par deux (I-II et IV-V), et les vers du milieu de chaque couplet riment entre eux.

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God Rest Ye Merry Gentlemen 2016

Que Dieu vous garde, maîtres,
En ce jour solennel,
Car Jésus vient de naître,
Le Sauveur, à Noël,
Pour sauver tous les êtres
Du tourment éternel.

Ref.: Nouvelles de paix [et] rédemption,
Consolation,
Nouvelles de paix [et] rédemption.

Voilà que Dieu le Verbe
Est né en corps humain;
Gardant ce fait superbe
Au cœur, quant au gamin,
Marie le met sur l’herbe,
Dans l’auge des bovins.

Envoyé par le Père,
Un ange est descendu,
Vers pâtres et bergères,
Leur dire qu’est venu
Le Fils de Dieu sur terre,
Au Bethléem herbu:

Qu’on fête et boive et mange
En ce Noël bien frais
Qu’on chante des louanges
Au Saint-Esprit d’un trait,
Au Père, au Fils en langes:
Dieu éternel et vrai.

Nativité et baptême.

ecce_maria_genuitParmi les antiennes qui se chantent à la Circoncision (1er janvier), il y en a une en particulier, qui est un reliquat de la célébration des trois manifestations du Christ le même jour, à savoir la nativité, le baptême, les noces de Cana. Il s’agit de l’antienne Ecce Maria genuit nobis.

Néanmoins, il y a un autre élément. Lors des laudes de Noël, l’un des psaumes est le 92 (93), qui dit: «Les fleuves, ont élevé, Seigneur, les fleuves ont élevé leur voix. Les fleuves ont élevé leurs flots,  au bruit des grandes eaux.» Curieusement, ce psaume est encadré par l’antienne Quem vidistis, pastores? qui n’a rien en commun avec le psaume qu’elle encadre.

nativite_baptesme_petitDe même, aux secondes vêpres de Noël, on chante le psaume 113, qui dit: «La mer le vit, et s’enfuit; le Jourdain retourna en arrière. […] Qu’avais‑tu en toi, ô mer, pour fuir ainsi, et toi, Jourdain, pour retourner en arrière?»

Lupin.

Lorsque nous sommes allés en Suède la fois passée, pendant notre long voyage en bus de Norcopie jusqu’à Stockholm, tout au long de l’autoroute il y avait de belles fleurs multicolores, surtout violettes. Il y en avait beaucoup! Puis devant la maison de la grand’tante, il y en avait encore! Et puis, des amis nous ont dit qu’ils ne savaient plus que faire de cette plante invasive.

Il s’agissait du lupin ou “queue de loup” (d’où son nom). Mais ce n’est pas qu’une plante décorativo-invasive. Il s’agit d’une bonne source de protéines. À l’instar du soja, les graines de lupin, riches en protéines, sont utilisées pour en faire du témpé. Donc voilà un truc qui peut dépanner les allergiques au soja!

Iconographie eucharistique.

Je vois souvent dans les églises l’image de la Cène de façon “michelangélique”, ou encore le souper d’Emmaüs, derrière l’autel.

Je trouve qu’à cet endroit, les deux représentations sont plutôt contre-productives. Entre autres, ce sont elles qui ont entretenu le mythe de la position du prêtre “versus spectatorem”.

Dans les Églises orientales, l’iconographie est celle de la “communion des apôtres”. Celle-ci représente, en effet, la façon dont la communion était distribuée dans les églises byzantines.

Personnellement, je pense que celle-ci pourrait être mise derrière l’autel, en bas du retable, comme un triptyque, coupée en deux, avec l’icône de Jésus-avec-la-vigne au milieu. Jésus-avec-la-vigne est l’icône la plus populaire en Transylvanie: le Christ est assis sur l’autel, à la place de l’hostie, avec un calice, dans lequel il presse du jus de raisin à partir d’une vigne qui pousse de son corps. Ça donnerait ceci:

eucharistie

Église catholique dans NT.

Deux choses que peu de gens savent à propos de la catholicité de l’Église: 1. Ce que ça signifie réellement; 2. Ça se trouve dans le Nouveau Testament.

Commençons par la second point. Dans Actes 9:31: Αἱ μὲν οὖν ἐκκλησίαι καθ’ ὅλης τῆς Ἰουδαίας καὶ Γαλιλαίας καὶ Σαμαρείας εἶχον εἰρήνην οἰκοδομούμεναι καὶ πορευόμεναι τῷ φόβῳ τοῦ Κυρίου καὶ τῇ παρακλήσει τοῦ ἁγίου Πνεύματος ἐπληθύνοντο. Dans d’autres codices: μὲν οὖν ἐκκλησία καθ’ ὅλης τῆς Ἰουδαίας etc.
catholicité

Voici les traductions en français:

Port-Royal: «Cependant l’Église était en paix par toute la Judée, la Galilée et la Samarie : et elle s’établissait, marchant dans la crainte du Seigneur, et était remplie de la consolation du Saint-Esprit.»

Martin: «Ainsi donc les Églises par toute la Judée, et la Galilée, et la Samarie avaient paix, étant édifiées, et marchant dans la crainte du Seigneur; et elles étaient multipliées par la consolation du Saint Esprit»

Osterwald: «Cependant les Églises étaient en paix par toute la Judée, la Galilée» etc.

Segond: «L’Église était en paix dans toute la Judée, la Galilée» etc.

Tous les traducteurs regardent καθ’ ὅλης («selon l’entièreté») comme si c’était un déterminant des toponymies qui suivent. La traduction la plus littérale devrait donner ceci: «Les Églises (ou l’Église) selon l’entièreté, de la Judée, et de la Galilée» etc. Ce verset démontre que les premiers chrétiens parlaient déjà de leur «Église selon l’entièreté». On trouve l’expression chez les pères apostoliques, notamment chez saint Ignace d’Antioche (+107). Ceci veut dire qu’on ne peut pas traduire le Nouveau Testament en isolement par rapport aux écrits des pères apostoliques.

Donc on devrait traduire ainsi: «Les Églises catholiques de Judée, de la Galilée» etc.

gateau_suedois_vegetalienC’est ce qui nous amène au sens du mot «catholique». L’Église est locale, et chaque Église locale est l’Église catholique. La base de l’Église est l’Église locale. Une Église locale est, même en isolement, tout aussi catholique que n’importe quelle autre Église locale. C’est comme le morceau de gâteau. Un morceau contient en lui-même toute la plénitude du gâteau, même en isolement. Toutes les couches y sont, tous les éléments.

Ainsi l’Église de Judée, l’Église de Samarie etc. ont la catholicité en elles-mêmes, et non conditionnée par la soumission à un hypothétique suprême pontife.

Les Églises locales sont «selon l’entièreté», donc catholiques, parce que tous les éléments de l’Église y sont présents, comme dans le morceau de gâteau.

Jeux de mots araméens.

Il y a quelques années, les Roumains ont découvert une homélie du métropolite Anthème le Géorgien, où ce prélat citait un passage biblique, en disant qu’il était «plus facile que la corde entre par le chas d’une aiguille, qu’un riche n’entre dans le royaume de Dieu.» Le mot roumain utilisé par Anthème était funea. Après investigation, les biblistes roumains ont décidé qu’Anthème avait raison. Sauf que tout le monde est habitué à l’expression «faire passer un chameau par le chas d’une aiguille»! Heureusement, la langue roumaine a un faux-archaïsme, camil, qui signifie «ceinture», et qui semble dérivé d’un autre mot grec, κάμιλος, de sens proche, mais qui semble être dérivé directement des versets bibliques en question! En bref, afin de rendre le second sens de l’araméen ghimela, les Roumains ont trouvé un artifice, à savoir un mot phonétiquement proche de «chameau», et dérivé de celui-ci, mais dont le sens – largement inconnu – s’approche de l’idée de corde, contenue dans l’original oral en araméen.

Comment faire un tel artifice en français? Même si l’on arrivait à mieux rendre le sens de l’original oral araméen, on ne peut tout simplement pas rendre ces passages en français «la corde par le chas d’une aiguille.» Si l’on devait appliquer la méthode des Roumains, il nous faudrait en français un terme phonétiquement proche de «chameau», mais qui rendrait l’idée de corde. Les seuls mots qui me semblent correspondre plus ou moins à cette exigence sont: «camelot» et «chamoisine».

Un autre exemple est celui du jeu de mots que Jésus a dû avoir en araméen avec le passage concernant Abraham et les enfants d’Abraham. Ce passage est largement discuté ici. En gros, “esclave” et “faire” se disent ´abad, puis “père” se dit abba, et cela sonne comme Abraham. La Bible anglaise du roi Jacques essaie de conserver le jeu de mots, avec bondage et abide. Comment rendre alors en français ce jeu de mots? Avec «Notre abave, c’est Abraham […] Vous faites les œuvres de votre abave. Vous êtes les enfants du diable, et vous voulez accomplir les désirs de votre abave.» De même, «abid» pour “esclave”, et «être habile» pour “faire”. C’est tiré par les cheveux, me diriez-vous. Je vous l’accorde.

Une autre chose intéressante, c’est le passage Luc 21:34 dans le manuscrit syrcur, qui se reflète plus ou moins bien dans la traduction de Port-Royal: «Prenez donc garde à vous, de peur que vos cœurs ne s’appesantissent par l’excès des viandes et du vin, et par les inquiétudes de cette vie, et que ce jour ne vienne tout d’un coup vous surprendre.»

Oer yw’r gŵr sy’n methu caru / Deck the Hall.

Grâce aux media, tout le monde connaît, même dans le monde francophone, l’air un noël avec «La la la.» On en trouve même une blague dans Le Cœur a ses raisons. À partir d’une traduction littérale du texte gallois (l’original ici), et en atténuant les idées matérialistes, je me suis proposé d’en faire une traduction poétique vers le français, avec une certaine adaptation toponymique. La mélodie peut être écoutée ici.

Il est froid, qui a en haine – Fla la la la la, la la la la
La montagne et notre plaine, (*)
Mais qui aime la rivière
A des fêtes de lumière. (**)

Froides sont les longues lettres
Qu’on reçoit, sans rien omettre;
Chauffe-toi lisant un livre;
Garde bien ton équilibre.

Tout est froid et sous la neige,
S’il n’y a rien qui protège;
La chaleur humaine en tête,
Bonne année, joyeuses fêtes!

______
(*) Changer, selon le cas: La forêt de notre Ardenne, Le pays de la Famenne / de l’eau de Haine / de Calestienne / de la Lorraine / Les polders de notre plaine etc.
(**) Alternativement: Mais qui aime notre Meuse | A les fêtes chaleureuses.

Père Nicolas.

Tout d’abord, je commence cet article en souhaitant une bonne fête à mon Nicolas. Car saint Nicolas a bel et bien existé; c’est l’un des évêques signataires du Ier concile de Nicée.

La “vie” de saint Nicolas, écrite plusieurs siècles après le “transfert” de ses reliques à Bari, raconte que le saint aurait donné des cadeaux à trois filles pauvres, pour les empêcher de se prostituer. De là l’habitude des adultes de donner des cadeaux aux enfants au nom de saint Nicolas. Sauf que la coutume n’est pas présente de la même façon dans la chrétienté. Chez les Catalans, c’est à l’Épiphanie qu’on donne les cadeaux aux enfants, de la part des rois mages. Dans l’Europe centrale et de l’est, c’est pendant le soir de Noël que les enfants reçoivent les cadeaux, de la part de Père Noël. Ce personnage fictif, qui se trouve malheureusement même dans l’icône de la Nativité en train de causer à saint Joseph, est considéré propriétaire de l’étable où est né Jésus, pendant que sa femme, Mère Noëlle, sert de sage-femme, et donne un bain à l’enfant Jésus.

Cependant, dans ce dernier cas, il me semble que c’est le folklore préchrétien qui a été assimilé dans le cadre chrétien. Par exemple, les Islandais ont les 13 lutons de Noël, dont le père est le troisième mari d’une trollesse, et même un chat-luton.

Ce fut d’abord Luther qui trouva qu’on ne devait pas parler d’un personnage mythique comme le Père Noël; donc il offrit des cadeaux à ses filles en cachette, pour leur demander ensuite: «Qu’est-ce qu’il t’a apporté, le Seigneur Christ?» Les régimes de type stalinien, prétendant supprimer la superstition, introduisirent le Père Gélard.

Quant aux saints historiques comme Nicolas de Myre en Lycie et les mages ayant trouvé le Christ, je trouve qu’il est malsain que de leur attribuer les cadeaux du temps de Noël, car une telle croyance usurpe la doctrine chrétienne. En tant que chrétiens, nous croyons que les saints – Nicolas et les mages y compris – sont décédés, séparés de leurs corps, et que leurs âmes attendent consciemment la résurrection finale; même si nous trouvons en eux des exemples précieux, et même si nous sommes unis à eux dans la communion des saints, néanmoins, nous n’avons pas le droit moral de leur attribuer des choses surnaturelles fausses. Et le Christ n’a rien à voir là-dedans non plus. Lorsque j’étais petit, il y avait ces personnages surnaturels: Dieu, que les villageois adoraient à l’église, et le Père Noël/Gélard, qui apportait des cadeaux aux enfants. Quand j’ai découvert que le Père Gélard était la femme de ménage de l’école, déguisée avec une fausse barbe, tout mon univers surnaturel s’est effondré. Nous devons transmettre la foi aux enfants via des bases cohérentes.

pas_de_pere_noelUne autre blogueuse cite la même raison que moi, et en donne quatre autres. Bravo! Et un signe au bord de la route en rajoute une. Encore bravo!

Lorsque nous aurons des enfants, nous leur offrirons sans doute des cadeaux, et les encouragerons de faire de même (un enfant qui offre tel jouet à un autre devient moins matérialiste). Nous leur apprendrons également les vies de quelques saints post-bibliques, bien sûr.

osterkerzenMais, diraient certains, on ne peut pas remplacer quelque chose par du vide. C’est vrai. Cependant, nous ferons ni l’erreur de Luther, ni celle des régimes staliniens. Avant l’avent, nous passerons du temps à tresser une couronne d’avent; avant Noël nous cuisinerons ensemble, se cela les intéresse; avant Pâques, nous peindrons des cierges pascaux. Ils seront, sans doute, davantage fiers de ce genre de bricolage, qui aura une utilité liturgique et/ou culinaire, plutôt que des mochetés que leur institutrice leur demande de faire.

Football?

Quel avenir pour nos écoles? Quant à l’avenir de l’école belge, je suis tout aussi pessimiste ou optimiste qu’à l’égard de l’avenir de l’Église. Ni plus, ni moins.

Le collège Saint-Servais, qui est l’une des deux écoles qui se trouvent dans notre rue affichent, depuis plus d’un an, en très grand format, un panneau stipulant: «FOOTBALL ÉTUDES de la 1e à la 6e».

Plutôt que de d’attirer les jeunes vers les langues, les sciences etc., cette école se fait de la pub selon les règles du marketing. Quelle est la demande? Le foot. Ben, on va leur offrir du foot, quitte à en faire des barakîs.

Malgré que l’ASBL Ose la science a son siége social dans la même école, l’école elle-même n’a pas l’air de s’en vanter. L’école se barakise. Saint-Servais se barakise.

 

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