Tribus miraculis.

Enfin l’Épiphanie!

Malheureusement, je n’ai pas eu le temps de préparer une partition de chant grégorien de l’antienne Tribus miraculis avec les paroles en français. Néanmoins, voici l’original en latin, ainsi que la version anglophone. Pour l’écouter sur YouTube, cliquez ici.

Trois prodiges ont marqué ce jour que nous honorons : aujourd’hui l’étoile a conduit les mages à la crèche ; aujourd’hui l’eau a été changée en vin au festin nuptial ; aujourd’hui le Christ a voulu être baptisé par Jean dans le Jourdain, pour nous sauver, alléluia.

Circoncision.

La liturgie traditionnelle de tous les rites ayant Noël le 25 décembre fête, le 1er janvier, la circoncision du Seigneur. Le second jour de la fête est la nomination de Jésus. Mais, bien sûr, le second découle du premier.

Je suis fâché de ce que les liturgies non-traditionnelles de la plupart des Églises ont voulu occulter la circoncision du Christ. Pourquoi déjudaïser Jésus? Que la circoncision soit en acte barbare, je veux bien. La crucifixion l’est aussi! Sauf que Dieu se sert des événements barbares, pour les transformer en grâce.

Joyeux Noël 2013!

En ce Noël, je vous présente en français l’hymne A solis ortus cardine, composée par Cœlius Sedulius. Les couplets traduits par Georges Pfalzgraf sont écrits en caractères noirs; les couplets traduits par moi sont en vert:

A

Des lieux où le soleil renaît
aux terres où il disparaît,
louons le Christ qui nous est né
de Marie dans la pauvreté !

B

Le Tout-Puissant, le Créateur,
a pris un corps de serviteur,
pour en sa chair sauver la Chair
et tous les hommes qu’il acquiert.

C

Du ciel la grâce est descendue
dans une enfant qui la reçut :
La Vierge en son corps a porté
ce qu’elle n’a pu susciter.

D

Soudainement son chaste cœur
devint le temple du Seigneur,
et, sans aucun concours humain,
elle a conçu de l’Esprit Saint.

E

Louons le Fils qu’elle enfanta,
que Gabriel lui annonça,
que Jean-Baptiste a pressenti
quand dans sa mère il tressaillit.

F

Sur de la paille on le coucha,
dans une crèche, sur un drap.
On le nourrit d’un peu de lait,
lui qui fournit tout à souhait !

G

Les chœurs célestes sont heureux,
les anges vont chanter pour Dieu.
C’est aux bergers qu’est annoncé
le grand pasteur tant espéré !

H

Pourquoi, Hérode, prends-tu peur
à la venue du Roi-Sauveur?
Loin de ravir des biens mortels,
son Règne apporte ceux du Ciel !

I

Aux Mages se manifesta
un astre qui les dirigea.
Ils montrent par leurs trois présents
qui est vraiment le saint Enfant !

L

Dans le Jourdain le Christ, l’Agneau
demande le baptême d’eau :
lui qui n’avait aucun péché,
de nos péchés nous a lavés !

M

Par ses miracles, en tous lieux,
Il démontra qu’il était Dieu:
Il guérissait âmes et corps,
Et il ressuscitait des morts.

N

Un grand prodige s’accomplit
aux noces de Cana par lui,
car l’eau des jarres fut changée
en vin de haute qualité.

O

S’agenouillant, ce centurion
Prie pour la vie de son garçon.
La foi du croyant a éteint
Le mal dont fut l’infirme atteint.

P

Pierre marcha sur les flots
Par le Christ qui le tint sur l’eau,
Car la nature avec ses lois
Sont contrariées par la foi.

Q

Au tombeau depuis quatre jours
Fut ressuscité par amour
Lazare qui sentait mauvais
Déjà, mais le Christ l’a sauvé.

R

La force issue de lui agit
Sur la femme à l’hémorragie;
Elle saisit son vêtement,
Et se vit guérie promptement.

S

Et au malade au corps défait,
Jésus lui dit de se lever;
Trouvant la santé, ce sabbat
Il marchait, portant son grabat.

T

Judas le prévaricateur
Osa trahir le Créateur;
Par un baiser il le frappait,
Car son cœur n’avait pas la paix.

U

Jésus, vérité, chemin, vie
Se fait flageller par l’impie;
Avec les larrons, l’innocent
Sur la croix a versé son sang.

X

Les myrrophores sont venues
Au tombeau pour oindre Jésus,
Mais l’ange dit: «Il est vivant,
Comme il vous l’a prédit avant.»

Y

Venez, chantons nos hymnes, fiers;
Le Christ a écrasé l’enfer;
Il nous a rachetés, rendus
Libres, nous, qui étions vendus.

Z

Le Fils seul-engendré de Dieu
Foula le diable, l’envieux;
Fermant la gueule du lion,
Monta au ciel à l’Ascension.

La doxologie a été ajoutée après Cœlius Sedulius:

Honneur et gloire à toi, Seigneur,
né de la Vierge en notre honneur,
ainsi qu’au Père et à l’Esprit,
durant les siècles infinis. Amen.

Verbum supernum prodiens.

Aujourd’hui, je vous présente ma traduction-adaptation de l’hymne Verbum supernum prodiens en français. Il s’agit d’une hymne qui se chante aux matines, le temps de l’Avent:

Verbe d’en haut, Dieu né de Dieu,
Lumière de Lumière né,
Du Père descendu des cieux,
Entré dans le temps, incarné,

Éclaire les cœurs maintenant
Avec le feu de ton amour;
Les vices qui nous troublent tant,
Arrache-les par ton secours.

Lors de ton redoutable Avent,
Escorté au milieu des chants,
Tu jugeras morts et vivants,
Récompensant bons et méchants.

Ne nous juge pas d’après
Nos péchés commis à dessein,
Mais donne-nous de célébrer
Avec tes anges et tes saints.

Gloire à toi, Christ, ô roi chéri,
Régnant avec notre Papa
Dans l’unité du Saint-Esprit,
Les temps qui ne finissent pas. Amen.

Entemplement.

Beaucoup de calendriers contiennent aujourd’hui une fête mariale. De quoi s’agit-il? On parle de l’ «Εἴσοδος τῆς Παναγίας Θεοτόκου ἐν τῷ Ναῷ» (entrée de la très sainte Déipare au temple), ou «Hierosolymis Praesentatio beatæ Dei Genitricis Virginis Mariæ in Templo».

La légende qui est derrière tout cela est fantaisiste. Non seulement le pontife avait le droit d’entrer dans le saint des saints une seule fois par an, mais alors prétendre que Marie eût vécu là-dedans, nourrie par les anges? Personne n’aurait accepté cela.

Il y a trois façons de faire avec ce genre de fêtes. 1. Tenir mordicus aux faits non-historiques. 2. Rejeter la fête tout simplement. 3. Donner à la fête une nouvelle signification.

C’est l’option 3 qui a été adoptée par l’Église bien souvent. Par exemple, il y avait une fois une fête des chaînes de saint Paul. Elle a été transformée en «conversion de saint Paul». La fête des chaînes de saint Pierre est devenue: fête de la chaire de saint Pierre dans l’Église romaine, et fête de la profession de foi de saint Pierre dans l’Église épiscopale des États-Unis.

Comment re-comprendre alors la fête de ce jour? Tout simplement, la vierge Marie est devenue le temple de Dieu, puisque le Verbe incarné a demeuré en elle. On pourrait parler d’un ‘‘entemplement’’ ou d’une ‘‘intemplation’’ de la BV Marie. En wallon, la fête de ce jour s’appelle, tout simplement, Nosse-Dame di novimbe. Pourquoi ne pas dire, en français, «Notre-Dame, temple de Dieu»?

Cette fête devrait nous pousser à devenir, nous aussi, à notre tour, des temples vivants de Dieu.

Avent 2013.

Nous commencerons l’Avent ce soir. Et, puisque nous suivons le rite romain, nous emprunterons les propres au rite mozarabe.

Celui-ci, malgré qu’il a des illations (préfaces) pour toutes les Messes, néanmoins, il n’a que deux introïts pour tout l’Avent, deux hymnes d’offertoire etc., qu’on alterne un dimanche sur deux. Et pas de secrète (prière sur les oblats).

Par contre, je vous traduits ici la prière ad pacem (qui précède immédiatement le baiser de paix, se trouvant entre l’offertoire et l’anaphore, comme dans certains rites orientaux):

Seigneur Dieu tout-puissant, qui, pour le salut du genre humain, par l’annonce des anges et par les entrailles de la Vierge Marie, as bien voulu nous envoyer ton Fils coéternel et coégal à toi, et qui, avant l’avénement de ton même Fils, as envoyé Jean pour prêcher, afin que, par la prédication de celui-ci dans le désert érémitique, le peuple pénitent reçût la rémissions des actions passées, et que le monde, évangélisé par le règne nouveau du Dieu-homme, daignât recevoir la grâce ineffable de la divine Trinité : donne-nous, en ce temps de l’avent, la grâce de la paix de ton même fils seul-engendré, car en ces derniers temps tu as daigné être généreux, et par la foi tu nous as compté dans sa société, nous qui, purifiés d’abord par Jean dans l’onde de pénitence des eaux du Jourdain au commencement de cette foi, fumes enfin baptisés de toi, par ton Fils, en l’Esprit saint et le feu ; car tu es notre paix véritable, et la Charité sans fin vit et règne avec toi et l’Esprit Saint, Dieu dans les siècles des siècles. Amen.

Voici également un morceau de chant mozarabe, que vous pouvez écouter en ligne.

Domssöndagen.

Dans le rite romain (traditionnel, bien entendu), il y a «le 24ème ou dernier dimanche après la Pentecôte», qui précède immédiatement l’Avent. L’évangile de ce dimanche parle du jugement dernier et du second avénement du Christ; c’est pourquoi, en scandinave on appelle ce dimanche-là Domssöndagen / Dómsunnudagurinn / Tuomiosunnuntai («dimanche du jugement») ou, en allemand, Ewigkeitssonntag, néerlandais Eeuwigheidszondag («dimanche de l’éternité»). Si je ne me trompe pas, le nom que donnent les Estoniens à ce dimanche, Surnutepüha, signifie «dimanche de l’attente».

Mais pourquoi lire cet évangile-là le dernier dimanche de l’année liturgique?

C’est que, dans le temps, dans le rite romain, l’Avent comptait non pas 4, mais 5 semaines! Ainsi, le dimanche de l’Avent (c’est-à-dire de l’avénement), c’était celui-ci! Puis, les quatre autres dimanches suivants ont pris leur nom à partir de celui-ci.

Dans l’Église romaine, le pape Paul VI n’a rien compris à tout cela, en 1969, lorsqu’il a remplacé ce dimanche par la fête, tout à fait artificielle, du Christ-Roi, elle-même datant de 1925. Malheureusement, d’autres Églises ont copié l’erreur.

D’après moi, le chemin du retour serait: soit la remise en place de ce dimanche de l’avénement en tant que premier dimanche de l’Avent de cinq semaines, soit, encore mieux, en tant que premier dimanche d’un Avent de six semaines, comme dans les rites non-romains.

Réforme.

Chez la plupart des protestants, le 31 octobre est la fête de la Réforme.

Je viens d’apprendre une drôle de nouvelle concernant certains de ceux qui se disent « orthodoxes ». Dans le passé, en France, les « orthodoxe de rite occidental » (ÉCOF) se sont fait éjecter, notamment par ceux qui ne pouvaient pas concevoir un autre rite que le rite byzantin.

Aujourd’hui, j’apprends que la même chose est arrivée également aux États-Unis. Sur son propre site web, l’Église orthodoxe russe hors-frontières, rattachée au patriarcat de Moscou, affirme avoir démis à la fois l’évêque Shaw et le prêtre Bondi (tous deux des acteurs du rite occidental dans ladite Église), et interdit à leurs paroisses occidentales de continuer à utiliser le rite romain. Pire encore, les évêques de cette Église-là rejettent les ordinations presbytérales ayant été accomplies – dans son propre sein – dans le rite occidental.

Cela démontre que, tout simplement, l’Église russe hors-frontières idolatrise le rite byzantin, et n’est ouverte à rien du tout. Si elle est incapable de respecter un rite traditionnel et parfaitement orthodoxe, comment sera-t-elle capable d’accepter une évolution quelconque de la société???

Ou est le Christ dans tout ça?

Ce sont les Églises autoproclamées « orthodoxes » qui ont besoin d’une réforme.

Quatre-temps d’automne 2013.

Cette semaine-ci, ce sont les quatre-temps d’automne.

Cette saison liturgique de jeûne et d’abstinence tire son origine du yom kipour juif. De même que les quatre-temps d’été sont liés aux moissons, pareillement les quatre-temps d’automne sont liés aux vendanges.

Il n’est pas fortuit que ce soient seulement les récoltes de blé et de raisin qui aient été marquées par la liturgie.

Il est important que nous donnions une place à Dieu dans nos travaux et nos récoltes. Les puritains de tous bords ont essayé d’éliminer tout cela, sous prétexte que l’homme moderne ne connaîtrait plus l’agriculture. Toutefois, l’histoire nous montre que les réalités pastorales ont résisté aux puritains. Ainsi, dans plusieurs endroit du monde occidental on a des festivals des vendanges, ainsi que le jour de la reconnaissance (Thanksgiving).

Et puis, la prétention selon laquelle l’homme moderne ne connaît plus l’agriculture est totalement fausse. Même les messieurs qui fabriquent des prières dans leurs bureaux se nourrissent du travail de l’agriculture. Tout ce qu’ils ont fait, ça a été de montrer un manque de reconnaissance envers Dieu et l’agriculteur.

Antoine-Basile 2013.

Hier, c’était la fête de saint Antoine de Padoue. Dans le temps, c’était un saint très vénéré en Occident. À vrai dire, chaque saint a eu son heure de gloire, pour ainsi dire. Il y a eu d’abord les saints auxiliaires, puis saint Joseph et saint Antoine de Padoue avec sainte Rita. De nos jours, sainte Thérèse de Lisieux et d’autres comme elle ont plus de popularité.

Le problème vient, me semble-t-il, du fait que les gens pieux ont moins envie d’imiter les saints dans leurs vertus et leur enseignement. Revenons, donc, à saint Antoine de Padoue. Sur YouTube vous trouvez un documentaire sur sa vie.

Beaucoup moins populaire a été saint Basile le Grand, que nous fêtons aujourd’hui. Au fait, si la date de la fête byzantine de saint Basile est le 1er janvier, cela présuppose une concurrence avec la fête de la circoncision du Seigneur; c’est pourquoi, l’Occident fête traditionnellement le 14 juin, jour de sa consécration épiscopale.

L’Occident tardif a vu dans saint Basile seulement le fondateur monastique oriental. À vrai dire, saint Basile a écrit une règle monastique, encore en vigueur chez certains moines et moniales de rite byzantin. Ainsi est-il en quelque sorte l’homologue grec de saint Benoît. (Dans sa règle, saint Benoît parle de saint Basile.) Et, comme l’Orient a toujours refusé de séparer la vie contemplative d’avec la vie active, saint Basile a également été le fondateur du tout premier hôpital, dans le sens moderne du terme.

Mais ce n’est pas pour son côté monastique que saint Basile est digne de louange. Au contraire, il est réputé pour ses écris théologiques, dont Contre Eunome et le Traité sur l’Esprit Saint, et la victoire de l’orthodoxie sur l’arianisme et le pneumatomachisme. (Plus de détails ici.)

Mais un autre thème, concernant Basile, et qui est tout à fait actuel, c’est la question liturgique de l’anaphore selon Basile.

Il y a plus de quinze ans, j’ai entendu une théorie de la bouche de certains patrolatres (*), prétendant que l’Église primitive eût connu seulement une ordo de la messe composé par saint Jacques de Jérusalem, et que saint Basile et saint Jean Chrysostome eussent abrégé cet ordo-là. Bien entendu, ces affirmations-là n’ont aucun fondement.

En réalité, l’anaphore selon saint Basile est l’aboutissement du développement organique d’une anaphore cappadocienne. C’est une longue anaphore, mais pas la plus longue que la Tradition nous ait conservée. Elle est complètement parsemée de citations bibliques, et a un beau bagage christologique. Et puis, théologiquement parlant, elle remplit parfaitement son rôle d’action de grâce.

Pourquoi, donc, l’Occident l’évite? Parce que l’Occident a été habitué à parler de « prière de consécration », comme si le but d’une telle prière était la consécration des éléments eucharistique. Du coup, suivant cette mentalité, il suffirait de dire quelques paroles magiques en vue de la consécration, et basta! Mais la Tradition nous dit autre chose. L’Église récite une telle prière dans le but de rendre grâce à Dieu. La consécration du pain et du vin est seulement une rawette! C’est comme lorsqu’on va souper chez des amis. Le but n’est pas de manger. On y mange, mais ça, c’est la rawette, même si le fait de manger est très important pour la santé. De même, la sainte communion est très importante; cependant le but de l’anaphore est de rendre grâce à Dieu. C’est le sens même du mot « eucharistie »: action de grâces.

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(*) En Occident, il y a des papolatres. En Orient il y a des patrolatres. Ces derniers prennent les pères de l’Église comme autorités incontestables, qui auraient des pouvoirs de décision émanant directement du Christ, et qui se substitueraient à la Tradition.