Rex sempiterne.

Voici ma traduction-adaptation de l’hymne Rex sempiterne Domine. Elle est prévue pour les matines du temps pascal. Vu qu’elle a été bousillée par un pape de triste mémoire, on ne sait pas trop quelle était la mélodie d’origine de cette hymne. Certains la chantent sur la mélodie du Nunc sancte, nobis, spiritus.

Revenons, donc, à notre Rex sempiterne:

Roi sempiternel, ô Seigneur,
De toutes choses Créateur,
Qui es depuis tout l’infini
Avec le Père et son Esprit,

Qui, faisant le monde, dedans,
En premier lieu créas Adam,
À ton image tu le fis,
Voulant ta ressemblance en lui.

Quand, par le diable, il se trompa,
Tu voulus qu’il ne mourût pas,
Tu décidas de t’incarner,
Et que l’homme fût pardonné.

Pour racheter le genre humain,
Que tu avais fait de ta main,
Afin qu’il fût divinisé,
Toi, Dieu, daignas t’humaniser.

Ta virginale incarnation
Étonne toutes les nations,
Mais nous croyons que, par ton corps,
Nous ressusciterons des morts.

Dans le baptême, tu délies
Les chaînes, et tu abolis
Les péchés, les taches des cœurs,
Car du péché tu es vainqueur.

Pour sauver l’homme, tu as pris
La croix, et pour payer le prix
Du rachat, tu donnas ton sang
En sacrifice d’innocent.

Nous te prions, toi, notre auteur,
En cette Pâque de bonheur,
De protéger ton peuple aimé
D’être par la mort consumé.

Seigneur, gloire à toi qui es fort,
Ressuscité d’entre les morts,
Avec le Père et l’Esprit Saint:
Un Dieu pour les siècles sans fin. Amen.

SOAD & Dér voghormea.

À la fin de l’album «Toxicity» de System Of A Down, il y a la chanson instrumentale, que voici.

D’où vient-elle?

Il s’agit du chant Der voghormea – Տէր ողորմէա´ (Kyrie eleison ou Seigneur, prends pitié) de la messe arménienne, et qui se chante pendant la fraction.

Taft.

Lorsque le missel dit de Paul VI est devenu obligatoire dans l’Église romaine, beaucoup de ceux qui n’ont pas accepté ce missel ont trouvé refuge dans le rite byzantin. Il y a un grand nombre de paroisses catholiques-byzantines et orthodoxes-byzantines, composées entièrement (ou presque) d’ex-catholiques-romains qui n’ont pas accepté la goûte de la “réforme” qui a fait déborder le vase. Tous ces gens-là sont passés au rite byzantin, pour sauvegarder la Tradition.

Les Occidentaux voulant pratiquer le rite romain traditionnel sont dans la même barque que les Orientaux. L’archimandrite Serge Keleher en parle. Rien de plus logique.

Je suis beaucoup moins chaud concernant le père Taft. Dans son livre La Grande entrée il nie totalement l’existence de l’offertoire. (Pour lui, offertoire et anaphore se confondent.) Voilà pourquoi il n’est pas étonnant de voir qu’il est un moderniste pur et dur, d’après ce qu’il dit. Au début, j’avais vraiment du mal à comprendre comment le plus grand liturgiste byzantin pouvait plaider pour la déformation liturgique!

Maintenant j’ai compris. C’est comme au zoo ou à la foire ou dans la réserve d’animaux. Le biologiste passe beaucoup de temps avec les animaux, il peut même les imiter, apprendre leur langage, écrire une œuvre en six volumes sur eux. Mais lui, il ne deviendra jamais un animal, et donc pour lui, les animaux resteront des animaux. C’est, à mon avis, la même chose que le père Taft fait vis-à-vis des Byzantins. Il les prend pour des bêtes de foire.

Lorsque j’étais dans l’Église orthodoxe, j’étais tout le temps horrifié par les superstitions. Mais lorsque le père Taft voit des commères roumaines qui agrippent le prêtre pendant la grande entrée, afin de lui soustraire quelque pouvoir magique par l’attouchement du calice ou de la chasuble, ça lui semble de la vraie piété. S’il avait vu ça en Occident, il en aurait été horrifié. Mais si ça se passe “chez les sauvages”, ça ne lui pose pas de problème; que du contraire.

Aurora lucis.

L’hymne des laudes du temps pascal, c’est Aurora lucis (connue aussi comme Aurora cælum purpurat ou Aurora cœlum purpurat). Elle est chantée aussi aux vêpres et aux matines/laudes des fêtes des apôtres. Voici ma traduction-adaptation de cette hymne en français.

L’aurore luit et resplendit;
Le ciel est de ton laus rempli;
Et le monde entre dans la joie;
L’enfer gémit dans son effroi;

Pendant que toi, notre roi fort
Sors de l’enfer ceux qui sont morts;
Tu foules la mort, qui se plie;
Les enchaînés, tu les délies.

Sous la pierre scellée, fermée,
Gardé par des soldats armés,
Triomphant et vainqueur héros,
Tu ressuscites du tombeau.

Tu soulageas tous les penauds
Trouvés en tourments infernaux;
L’ange resplendissant s’écrie:
«Est ressuscité Jésus-Christ!»

Les apôtres étaient confus
De ta mort, ô Seigneur Jésus,
Causée par le cruel dépit
De certains serviteurs impies.

Ainsi, l’ange qui resplendit
Aux saintes femmes a prédit:
«Dites aux apôtres d’aller
Le retrouver en Galilée.»

Pendant qu’elles se sont pressées
Pour aux apôtres annoncer,
Tu n’es montré devant leurs yeux;
Elles t’ont adoré, glorieux.

Et les disciples sont sortis;
En Galilée ils sont partis,
En espérant qu’ils reverraient
Ta face, ô Seigneur adoré.

En ce temps pascal sans pareil,
Radieux il brille, le soleil;
Te leur montrant ressuscité,
Tu mis fin à leur cécité.

À ceux que tu as appelés,
Ô Christ, tu leur montras tes plaies;
Elles témoignent haut et fort
Que tu t’es relevé des morts.

Christ, notre roi clément, vainqueur,
À toi nos âmes et nos cœurs!
Nous te glorifions en chantant
Notre louange en tous les temps. Amen.

Άγιος ο Θεός + Popule meus.

Voici une très belle version des impropères du Vendredi-Saint:

www.youtube.com/watch?v=ZUZ4FM2b-Kk

Malheureusement, la plupart des églises occidentales chantent des bobards à la place.

Quand je serai vieux, j’essayerai de remettre ça en français et en wallon.

Jeudi-Saint 2014.

Dimanche passé, une amie prêtre me disait ceci: «Le Jeudi-Saint, nous avons toujours lu l’évangile de la Cène; d’autres font le lavement des pieds.» Je lui ai dit que les deux choses n’étaient pas incompatibles.

Comment célébrer le Jeudi-Saint? Passons en revue quelques cas.

I.

Dans le rite byzantin, d’après les rubriques (monastiques), il se passe ceci: après les matines et les petites heures, les moines vont au réfectoire. On lit l’évangile selon Jean, avec le lavement des pieds, mais en dialogué (le père abbé joue le Christ, le trésorier joue Judas, le prieur joue saint Pierre). On mange des légumes cuits à l’huile, puis, «à la huitième heure» (15 h), on va à l’église, où l’on célèbre la Messe vêprée, en y lisant l’évangile de la Cène selon Matthieu.  Malheureusement, les Byzantins ne le pratiquent pas du tout. Au plus souvent, ils font une Messe en toute vitesse le matin du Jeudi-Saint, uniquement dans le but de constituer la réserve eucharistique, puis le soir du Jeudi-Saint ils célèbrent les matines du lendemain (chemin de croix).

II.

Dans le rite latin, le lavement des pieds peut être fait avant ou après la Messe. Mais aux deux, c’est uniquement l’évangile du lavement des pieds qui est lu, et l’épisode de la Cène n’est pas lu.

III.

Chez les Suédois, on peut choisir l’évangile qu’on va lire. On peut même lire le discours du le pain de vie, Jean 6.

* * *

La théorie latine a un gros manque, puisqu’elle omet le récit de la Cène. Le pire, c’est quand le lavement des pieds se fait entre l’Évangile et l’offertoire. Du coup, c’est ça qui devient central. Mais non; on a loupé le but.

L’idée suédoise de lire Jean 6 me semble intéressante, qui on veut alterner les lectures sur l’eucharistie sur quatre ans.

La théorie byzantine me semble la plus correcte. Le Christ a lavé les pieds des disciples avant la Cène; donc il faudrait faire le lavement avant la Messe, en lisant l’évangile selon saint Jean y afférent. Puis, à la Messe, on devrait lire l’un des récits de l’institution de l’eucharistie. Et ceci, quel que soit le rite qu’on emploie.

Il ne faut pas oublier que la Messe du Jeudi-Saint est celle d’une occurrence: les secondes vêpres du Jeudi-Saint sont les premières vêpres du Vendredi-Saint. Cette Messe appartient aux deux jours liturgiques. Au début de cette Messe, le prêtre devrait être en chasuble (ou chape) blanche; puis, au début de l’offertoire, il devrait prendre une chasuble de la Passion (noire/violette/rouge). À la vigile pascale, le mouvement devrait être le contraire: commencer la vigile en chape noire/violette, puis revêtir la chasuble blanche à partir de la fin des baptêmes.

Vexilla regis.

Voici ma traduction-adaptation en français de l’hymne Vexilla regis, écrite par Venance Fortunat:

Procèdent les drapeaux du Roi
Pour le mystère de la croix:
Celui qui fit la chair, dessus
Avec sa chair fut suspendu.

Tes mains et pieds furent cloués,
La victime fut immolée;
La grâce de la rédemption
Nous vint par ta crucifixion.

Au dernier coup, celui du fer
De lance, qui perça ta chair,
Sortirent de toi eau et sang,
Pardon des crimes jaillissant.

C’est sur la croix que s’accomplit
Ce que David avait prédit:
«Annoncez parmi les gentils:
Dieu règne par le bois», dit-il.

C’est l’arbre que tu pris exprès
Et de ton sang as empourpré;
C’est sur ce lit qu’on t’a couché,
Et par ton corps il fut touché.

Ce bois en mains, tu as voulu
Porter au monde le salut;
Dans ton corps, tu sauvas la proie
De l’enfer, cloué sur la croix.

De son écorce, tu répands
De doux parfums; sur elle pend
Le fruit que tu nous as acquis
Quand sur la mort tu as conquis.

Réjouis-toi, victime et autel,
Sacrificateur éternel,
Vie qui souffris la mort et qui
Par ta mort nous rendis la vie. Amen.

Nouvelles de Suède.

J’ai vu tantôt sur la toile que le premier mariage religieux juif en Suède avait eu lieu en juin dernier. Vidéo ici.

Qu’en est-il de l’Église suédoise? Pour commencer, en 2006, elle a publié une liturgie pour la bénédiction des couples de même sexe, après un partenariat civil. Texte ici.

Mais en 2009, elle a décidé du mariage sexuellement neutre. Du coup, des textes alternatifs ont été élaborés, et ils sont présents ici. Essentiellement, «tu les créas homme et femme» est devenu «qui créas l’homme à ton image». Les prières insistent sur l’amour.

Je vois en vente le Missale för Svenska kyrkan, édition 2013, qui contient également «Sjungen Förbön vid vigsel samt vid vigsel för par av samma kön» («les prières chantées, avec le mariage ensemble avec le mariage des couples de même sexe»). Une preuve de plus qu’on peut être à la fois high church et progressiste.

J’apprends également (ici) l’utilisation des couronnes pour le rituel du mariage, et m’en réjouis. En Orient, le mariage entre un homme et une femme s’appelle « couronnement » (mais parfois il était utilisait également pour l’affrairement). L’utilisation des couronnes de mariage existait par ci par là en Occident aussi. Par exemple, à l’église Saint-Médard à Anderlues, pour ne citer que la Belgique. Le fait que ça reprenne racine en Suède me semble un bon signe, surtout pour le symbolisme.

Photo ci-contre: Vera & Annika.

 

Iam Christe sol iustitiæ.

Voici ma traduction-adaptation en français de l’hymne Iam Christe sol iustitiæ (orthographiée aussi Jam Christe sol justitiæ). Cette hymne se chante aux laudes – fin de matines – des lundis du carême.

Çà, Christ, ô justice et soleil,
Veuille nous désenténébrer;
Comme le jour réapparaît,
Éclaire la terre au réveil.

Donne un bon climat aujourd’hui;
Convertis les cœurs des pécheurs;
Change, dans ta bonté, les pleurs
Des gens souffrants, et les réjouis.

Accorde, nous te demandons,
Au monde de se convertir,
Pour les péchés le repentir
Qui entraînera le pardon.

Des cieux tu reviendras un jour;
Heureuse, voudra t’adorer
Ta création, qui, restaurée
Par ta grâce, t’attend toujours.

Que tout t’adore, Trinité,
Et nous, sauvés dans cette foi,
Te chantons encore une fois:
Un Dieu pour toute éternité. Amen.

Saint-Benoît.

Dans le rite byzantin, le 14 mars, c’est la fête de saint Benoît. Dans le calendrier occidental, elle tombe le 21 mars. Le 12, c’était la fête de saint Grégoire le Grand. Puisque les fêtes de ces deux saints tombent en carême, elles restent des fêtes mineures, et l’on fête avec plus de solennité la translation de saint Benoît le 11 juillet, et le sacre épiscopal de saint Grégoire le 3 septembre.

Lorsque j’étais séminariste dans l’Église orthodoxe, j’avais une grande dévotion envers saint Benoît. Sans doute, pour sa modération, comparée à l’excès de zèle des moines orientaux. Sa modération et l’exigence de l’étude chez les moines. Tous les ans, j’avais l’habitude de chanter ses matines du 14 mars. À plusieurs reprises j’ai participé, dans des monastères, à la messe des présanctifiés le jour de sa fête (soir le soir du 13, soit le soir du 14).

À l’époque, mes camarades séminaristes me considéraient trop occidental. Aujourd’hui, beaucoup me considèrent trop oriental. Moi-même, je crois que la Tradition n’est qu’une, même si elle peut s’exprimer dans de différentes formes. Ici, en Occident, je sens le devoir d’être occidental, en m’encadrant dans la continuité des centaines de générations de Belges qui nous ont précédés, depuis que l’Évangile est arrivé ici jusqu’à nos jours. De ce fait, pour moi, la communion des saints signifie l’expression de la foi à leur manière. Néanmoins, parfois je me réjouis de pouvoir me trouver, en touriste, dans des oasis orientales en Occident. Dans pareils cas, je sens être un Oriental encore plus authentique que ceux qui ont adopté tardivement le rite byzantin et qui auront toujours quelque chose de trop non-oriental en eux.

Je pense que les Occidentaux doivent témoigner des idées progressistes devant les Orientaux, tout comme les Orientaux doivent aider les Occidentaux à ne pas perdre leur propre héritage.

Ci-contre: l’icône de saint Benoît, sur l’iconostase de l’église byzantine du Monastère de Chevetogne.