Retour de Baal?

En cette fête du saint prophète Élie, je voudrais vous faire part de ces réflexions.

Yahvé se révèle dans l’Ancien Testament, mais il n’est pas seulement le Dieu du peuple Israël. Au contraire, Yahvé reconnaît le culte que d’autres peuples lui rendent, sous d’autres noms. Ou l’on devrait plutôt dire que le peuple élu reconnaît son propre dieu chez d’autres peuples. Ainsi, par exemple, Melchisédech est sacrificateur d’El Elyon; Balaam est prophète d’Elyon; le non-Hébreu Job adore El Schaddaï etc. Ceux-ci sont tous identifiés avec Yahvé. Saint Paul, en voyant l’autel grec dédié au «Dieu inconnu», l’identifie également avec Yahvé. Lorsque le peuple hongrois, adorant le dieu Ischtanou (hongr. Isten), s’est converti au christianisme, les chrétiens l’ont identifié comme étant le même que notre Dieu.

Il y en a un qui fait défaut, alors qu’en théorie il aurait très bien pu être lui aussi assimilé à Yahvé, d’autant plus que son nom – Baal – signifie, tout simplement, «Seigneur». L’histoire du prophète Élie aurait alors été beaucoup plus simple et plus « sympa ». Au lieu de rabrouer Achab, Élie aurait tout simplement pu lui dire quelque chose du genre: «Tu sais, roi Achab, il n’y a pas de problème. Baal est juste un autre nom de notre Yahvé. C’est juste une question de terminologie. Faisons la paix.» Pourtant, cela n’a pas pu se passer ainsi. Yahvé refuse d’être identifié à Baal. Pourquoi?

Yahvé est le Dieu sexuellement neutre. Il est à la fois « père » et « mère ». Baal est, au contraire, un pur mâle, figure masculine par excellence, à laquelle on associe parfois la déesse Anath ou la déesse Astarté, qui sont, à l’opposé, des figures féminines. Il y a une complémentarité entre Baal et la déesse.

Lorsque Yahvé, notre Dieu, s’est incarné, il a assumé toute l’humanité. Différentes hérésies ont essayé de nier la plénitude de l’humanité du Christ. Les apollinaristes croyaient que le Christ manquait d’intelligence humaine; les monothélites croyaient que le Christ manquait de volonté humaine. Saint Grégoire Nazianzène répondit aux apollinaristes, et saint Jean Damascène aux monothélites, avec les mêmes paroles: «Ce qu’Il n’a pas assumé, il ne l’a pas guéri; mais ce qui est uni à sa divinité a été sauvé. […] Si c’est la nature humaine toute entière qui est déchue, elle a dû être toute entière unie à la nature de Celui qui est né, et être sauvée toute entière.» Le Christ n’a donc pu manquer d’aucun élément de la nature humaine; autrement l’incarnation est un échec.

De nos jours, au nom de la « nature », certains veulent nous faire croire qu’il y aurait une différence ontologique entre deux groupes: les mâles et les femelles. De ce fait, par exemple, les femelles ne pourraient pas – selon eux – représenter le Christ mâle dans le triple ministère d’évêques, prêtres et diacres. De ce même fait, le mariage serait la complémentarité entre le masculin et le féminin. Ce faisant, les partisans de cette théorie supposent que le Christ manquerait d’une partie de l’humanité. Car, si l’humanité se partage entre mâles et femelles, et que le Christ fût seulement mâle, comment les non-mâles seraient-elles/ils sauvé(s)s? Un Jésus exclusivement mâle, ontologiquement différent des humains non-mâles, n’est qu’un Baal incarné. Rien à voir avec notre Yahvé.

Il est évident que le sexisme (qu’on pourrait, plus précisément, appeler monophylisme ou androphylisme) est une hérésie christologique. Elle est en train d’être juste couvée pour l’instant. Mais les choses pourraient empirer. D’une part, à la Pentecôte 2015, les Églises orthodoxes des sept conciles auront leur « concile panorthodoxe », qui sera, pour elles, le huitième concile œcuménique. Jusqu’à présent, on a toujours dit que les Églises dites orthodoxes n’avaient pas de position officielle sur un grand nombre de sujets, étant donné qu’elles n’ont plus eu de concile depuis l’an 787. Dorénavant, les Églises des sept conciles auront une opinion claire et officielle sur, entre autres, l’homosexualité, les genres etc., et l’éventualité d’une officialisation de l’hérésie androphyle menacerait l’épithète «orthodoxe» que ces Églises aiment tant arborer. Et le synode romain qui aura lieu pendant la fête des saints Serge & Bacchus, comment se positionnera-t-il vis-à-vis de l’hérésie sexiste? Assisterons-nous au retour de Baal?

Ci-contre, un ancien temple de Baal.

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